Sylvie Gaufreton
Une vie en deux actes
Sylvie Gaufreton, une vie en deux actes
27 septembre 2023
Commerces
Baignée dans une famille d’horticulteurs et de pépiniériste, Sylvie Gaufreton a démarré sa carrière professionnelle dans le milieu hospitalier. Mais les difficultés du métier l’ont amenée à choisir une autre voie après dix-huit ans de bons et loyaux services. Malgré des épreuves douloureuses, elle a su rebondir pour vivre de sa passion.
Anjou Maine Découvertes : Comment s’est passé le début de votre carrière ?
Sylvie Gaufreton : Mon père et mon frère étaient horticulteurs et mon oncle pépiniériste. Malheureusement, ils sont tous décédés relativement jeunes. A l’origine, je voulais faire un métier manuel et j’avais pensé être décoratrice d’assiettes de Limoges. Les études étant trop loin, mes parents m’ont demandé de choisir autre chose et finalement, j’ai fait un BEP Sanitaire et Social pour rentrer dans un hôpital.
AMD : Ça vous éloignait de votre objectif initial ?
S. Gaufreton : Effectivement, mais c’était un métier que j’aimais beaucoup par le côté relationnel avec les gens. J’ai démarré dans une maison de retraite puis j’ai passé vingt huit ans en traumatologie avec comme patients beaucoup d’accidentés de la route. Au fil du temps, je me suis aperçue qu’il n’y avait pas suffisamment de reconnaissance par rapport à nos compétences et notre implication sans faille dans le service. J’avais à coeur de faire mon travail du mieux que je pouvais mais ce n’était pas remarqué. A ma demande, j’ai quitté la traumatologie pour être tranférée en soins intensifs de neuro-chirugie durant mes dernières années. C’est à ce moment-là que j’ai perdu mon père seulement âgé de 57 ans. J’ai trouvé injuste qu’il parte si tôt et pendant des années, j’ai gambergé au point que j’ai finalement pris la décision de changer de métier pour lui rendre hommage.
AMD : Comment s’est déroulée votre reconversion ?
S. Gaufreton : Je pouvais prétendre à un congé formation au sein de l’hôpital. Le dossier a été accepté, ce qui me permettait d’avoir une longue période de disponibilité pour reprendre des études à l’école de la Piverdière et ayant obtenu un diplôme avec mention très bien, je me suis installée à Durtal. Le métier de fleuriste était devenu une évidence tellement ça me coulait tout seul des doigts. Certes, j’ai démarré sans avoir de CAP mais je l’ai passé plus tard en candidate libre même si le certificat Piverdie est une garantie de compétence professionnelle.
AMD : Votre vie prend donc un tournant positif.
S. Gaufreton : J’ai l’impression que le sort s’acharne puisqu’un an après mon arrivée à Durtal, je perds mon frère âgé de 37 ans. Je ne sais pourquoi, peut-être pour lui rendre hommage de la même façon que pour mon père, mais je ressens le besoin d’ouvrir un second commerce. Une année plus tard, c’est ma mère qui décède. Ça commençait vraiment à faire beaucoup et il m’a fallu garder la tête froide pour avancer.
"La reconnaissance du public incite à aller de l’avant."
AMD : Était-il facile de gérer deux boutiques ?
S. Gaufreton : J’avais une salariée à temps partiel sur un commerce, ce qui m’a permis de gérer l’autre boutique. C’était néanmoins chronophage et je n’avais pas pensé que j’allais peut-être aussi perdre ma famille qui me voyait très peu. Il a fallu que je ménage mon temps.
AMD : Avez-vous gardé un contact avec la Piverdière ?
S. Gaufreton : Il me paraissait important de juger mes aptitudes et j’ai participé à plusieurs concours dont le Piverdie d’Or au château de Brissac. La reconnaissance du prix du Public m’a apporté beaucoup d’encouragement et cela m’a incité à aller de l’avant, me permettant ainsi de réaliser des choses atypiques et des commandes un peu hors normes comme celle pour le Centre des Congrès d’Angers où 900 personnes étaient réunies.
AMD : Les années passent et comme beaucoup, pensez-vous à votre retraite ?
S. Gaufreton : Surtout pas ! Tout d’abord, c’est un métier de passion. Je me sens tellement bien que je n’ai aucune raison de mettre un terme à cette activité que j’exerce depuis quinze ans maintenant.
AMD : Vous évoquez la passion. Que vous procure-t-elle ?
S. Gaufreton : C’est avant tout de me lancer des défis au niveau des créations. Et il y a aussi les rapports humains, un peu comme à l’époque où je travaillais dans le milieu hospitalier. En fait, il y a des similitudes entre les deux métiers. Je suis là durant les moments de peine lors d’une sépulture mais aussi lors des moments de joie pour les mariages ou simplement lorsqu’un amoureux vient acheter un bouquet de fleurs pour la Saint Valentin. Mon rôle est de créer de l’émotion au travers de mes fleurs.
AMD : Quels autres services proposez-vous au sein de votre boutique ?
S. Gaufreton : Depuis de nombreuses années, je propose des ateliers floraux. Ce temps passé avec les personnes est un régal. C’est le bonheur de transmettre un savoir-faire, une passion. Ces ateliers sont mis en place en partenariat avec d’autres fleuristes, dont au Japon.
AMD : Mais le Japon est à l’autre bout du monde...
S. Gaufreton : J’ai sympathisé avec une Japonaise qui était venue en France pour effectuer les mêmes études que moi et je me suis rendu compte qu’elle n’allait pas très bien moralement. Cela s’expliquait par des conditions de vie trop rudimentaires. Je lui ai proposée de venir s’installer à la maison et nous avons passé quatre mois ensemble. Notre relation amicale, presque fraternelle, s’est renforcée et j’ai été invitée au Japon. Nous sommes partis à quatre et à mon arrivée, j’ai vu à quel point l’accueil que l’on me réservait était presque celui d’une reine.
AMD : Gardez-vous des souvenirs particuliers de ce voyage ?
S. Gaufreton : Nous sommes restés quinze jours durant lesquels j’ai découvert un autre monde, une autre philosophie. Être prise en charge avec autant de bienveillance, je n’ai jamais connu cela ailleurs. De plus, j’ai pu découvrir les locaux Piverdie de Tokyo qui n’existent plus aujourd’hui.
AMD : L’avenir, comment le voyez-vous ?
S. Gaufreton : Tant que j’ai la santé, je vais continuer. Seule une opportunité de reprise sérieuse par quelqu’un m’incitera à vendre la boutique. Mais pour le moment, je n’y pense pas. Et puis, le fait de m’imaginer retraitée, je n’y arrive pas. J’ai besoin d’être active, de me sentir utile.
Tout le contenu du site www.anjou-maine.fr est protégé et soumis au respect de la propriété intellectuelle.